Question de société

Un quinquennat anti-démocratique

By 7 mai 2020 mai 24th, 2020 No Comments

Date symbolique ou pas, aujourd’hui le Président de la République devrait célébrer son troisième anniversaire depuis la prise de ses fonctions à l’Elysée. Si l’on pouvait encore douter du bien-fondé des responsabilités engagées pour un Président de la République, on peut quand même s’accorder à dire que le passage des derniers résidents de l’Elysée auront laissé des traces. Impérissables ou non, je vous laisse en juger en fonctions de vos sensibilités.

Des années Chirac, c’est plus le charisme de l’individu que le bilan mitigé de ses dernières années en charge de l’Etat qui reste en mémoire. On se rappellera que sous le quinquennat de Sarkozy, l’âge minimum légal de départ en retraite est repoussé de 60 à 62 ans. Ce sont surtout les Libyens qui se souviendront de l’intervention des troupes françaises dans leur pays via des allégations fabriquées, jamais démontrées. Et puis sous Hollande, on retiendra le mariage pour tous, le non-cumul des mandats, et l’accord sur le climat à l’issue de la COP21. Mais ce sont aussi cinq années émaillées de scandales et d’une impopularité sans précédent avant que l’on bascule dans l’ère Macron.

 

Un régime politique de royauté « revisitée »

En consultant les livres d’histoire, on s’aperçoit que certains évènements d’à peine 200 ans d’âge, se renouvellent sous nos yeux. Par exemple si l’on met en parallèle le règne de Charles X (1757-1836) au quinquennat d’Emmanuel Macron, on peut remarquer certaines ressemblances troublantes…

Le premier devint roi à 67 ans d’une faction monarchiste radicale. Le sacre d’Emmanuel Macron provient d’une mouvance où tous les acteurs de bonne volonté et porteurs de projets innovants pour le renouvellement de la vie politique française,

C’est sous son règne de Charles X que furent appliquées les ordonnances de juillet 1830 dissolvant la Chambre des députés, limitant le droit de vote et réimposant la censure de la presse.

C’est sous le gouvernement du Président de la République, que l’Assemblée nationale, puis le Conseil constitutionnel ont validé définitivement la loi du confinement, avec au passage un temps limité au débat.

Le règne du roi de près de six ans s’est révélé profondément impopulaire dès son couronnement en 1825, conduisant à des émeutes urbaines qui ont encouragé à la révolution de juillet 1830.

Bizarrement, on retrouve cette impopularité depuis la prise de pouvoir d’Emmanuel Macron. Que ce soit de la façon dont son gouvernement a géré la crise des gilets jaunes, la réforme des retraites (qu’il a lui-même initiée) et la crise sanitaire liée au Covid-19, à chaque fois, il en a résulté un chaos indescriptible, tournant même à des mouvements de soulèvement et de violence – voir « Cette France ingouvernable ».

 

Qu’attendre d’ici la fin du quinquennat

Si depuis son élection, Emmanuel Macron a bien restauré l’image de la fonction présidentielle – on sait qu’elle en avait grandement besoin suite à l’image laissée par son prédécesseur ! – les premières années de son mandat ont mis à mal une partie d’un des points de sa stratégie : la construction d’une autre Europe.

L’un de ses objectifs largement développés lors de son programme de 2017 ciblait le retour à une puissance européenne. Or, après l’inertie et l’indécision démontrées par la France sur l’échiquier européen pendant toute une décennie, le récent retour sous son leadership fait à présent apparaitre de nouvelles frictions au sein des 27 pays, Etats membres de l’Europe.

Et comme l’ampleur de la crise sanitaire qui n’était en tout point aucunement prévisible, est passée par là, la patience des Français a été largement consommée. Dans ce contexte, peut-il encore espérer redresser l’économie de la France et continuer à avoir un impact sur le resserrement des liens en Europe ?

Les dernières élections municipales avortées n’ont pas été favorables au pouvoir en place. Ce qui veut dire que le mouvement d’Emmanuel Macron n’a d’autre choix que de nouer des alliances, alors que la création de LREM était de mettre fin à cette tendance très « politico-politicienne ».

Ce qu’il y a de certains, c’est que les prochains choix politiques ou budgétaires ne devront pas être trop radicaux, sous peine de voir la capacité disruptive d’Emmanuel Macron mise une fois de plus à rude épreuve.

Pourtant on peut envisager que l’écologie restera comme sa grande priorité jusqu’à la fin de son mandat. D’abord parce qu’elle répond à une nécessité : on le voit avec la formation d’un nouveau groupe parlementaire qui affiche l’économie parmi ses priorités, dont six de ses membres ont été liés avec l’ascension de LREM. De là à penser que le programme actuel du gouvernement n’est plus suffisamment axé sur les défis que sont le dérèglement climatique, l’effondrement de la biodiversité, l’épuisement des ressources naturelles…

 

Another Brick in the Wall*

Nous l’avons vu lors de la mobilisation contre la réforme des retraites, les corps intermédiaires et les corporatismes ont fait leur retour en force. Tous ont su arracher une concession au gouvernement.

Le président a mis en œuvre un style « jupérien » (ou l’exercice du pouvoir est vertical et très contrôlé), qu’il tente d’assouplir à mesure que sa cote de popularité s’effrite.

Signe des temps, où les journées du pouvoir sont plutôt rythmées par l’urgence sanitaire, économique et sociale du pays, et surtout l’incertitude des jours prochains, la reconstruction de la France, cette fameuse union sacrée nationale est loin d’être acquise !

 

Pourquoi le management de ce pays donne-t-il cette sensation de décadence, où tout est géré dans l’urgence et que le prévisionnel est aussi aléatoire que celui d’une personne qui se retrouve mis à la rue ? Mais est-ce vraiment qu’une impression ?

*Explications : le choix du titre du célèbre groupe « The Pink Floyd » est un clin d’œil à la chanson, dont le sens profond est que l’enseignant représente en fait le gouvernement et les élèves sont les gens. Le gouvernement restreint la liberté des citoyens car il veut tout contrôler.