Question de société

Les numéros verts de la République

By 29 janvier 2021 janvier 31st, 2021 No Comments

Au lendemain du drame qui a eu lieu dans la Drôme, n’est-il pas temps de se demander ce que fait l’Etat français pour accompagner les personnes fragilisées par l’absence d’activité professionnelle ?

30 secondes de recherches sur l’Internet, vous permet de comprendre que de notre société a tout simplement abandonné les demandeurs d’emploi. Si vous en doutiez, voici les faits !

 

Une plateforme toute sauf bien huilée

L’Institut national de la statistique et des études économiques nous rappelle que les demandeurs d’emploi sont classés en trois catégories, liées à des tranches d’âge bien spécifiques. L’INSEE nous communique les chiffres officiels du Pôle Emploi concernant le taux de chômage au troisième trimestre 2020 :

  • la catégorie ‘A’ : avoir moins de 25 ans ou 21.8%
  • la catégorie ‘B’ : être âgés entre 25 et 49 ans ou 8.5%
  • et la catégorie ‘C’ : être âgés de 50 ans et plus ou 6.1%

Il y a aussi deux autres catégories :

  • La ‘D’, ceux/celles en arrêts maladie / maternité, les individus inscrits comme « en formation » (certifiante ou non, mais enfin ils sont casés !).
  • La ‘E’, qui inclut les personnes pourvues d’un emploi ou en création d’entreprise.

 

Dans la réalité…

A ces chiffres s’ajoutent tous ceux :

  • sortis des listes pour ‘x, y ou z’ raison
  • en défaut d’actualisation (déceptions liées à cette usine à gaz)
  • en radiation administratives et autres cas (partis à l’étranger, décédés ou actuellement incarcérés)
  • et bien sûr les non-inscrits

Pour aider les demandeurs d’emploi, l’Etat leur a mis un numéro à disposition : le 3949 qui est gratuit, si sensé vous ayez une ligne fixe comme il est indiqué sur le site du Pôle Emploi. Sinon, on met un point d’honneur à informer les utilisateurs de ce service, que tout appel sera décompté de votre forfait ou facturé au prix d’une communication normale.

Quand on sait que les demandeurs d’emploi sont, en principe, des personnes qui vivent dans une situation précaire et dont les fins de mois peuvent être financièrement difficiles, on pourrait questionner la cohérence de ce dispositif.

Pourtant, on insiste sur le « laissez-vous guider », avec même une option de, je cite :« Tapez directement le numéro du service souhaité. »

On peut malgré tout penser que si le 3949 existe, c’est pour éviter que les agents du Pôle Emploi ne soient pas ‘harcelés ». Il y a donc peu de chance qu’ils vous révèlent leur ligne directe.

A tous ceux qui n’ont jamais eu à appeler, vous ne savez pas la chance que vous avez. Pour les autres, eux seuls savent la difficulté pour obtenir le bon interlocuteur. Du coup, il est souvent beaucoup mieux de s’abstenir !

 

Et pourtant, même les télétravailleurs…

Et oui, car dans le cadre des nombreux reconfinements et de la généralisation du télétravail dûs à la mauvaise gestion du gouvernement, dans sa grande bonté le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion a mis en place une ligne téléphonique afin d’accompagner les salariés des TPE et PME, qui vivent difficilement l’exercice de leur activité en télétravail.

Ce numéro vert qui permet « d’écouter, soutenir et conseiller les télétravailleurs », est un service téléphonique anonyme, gratuit et ouvert 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

 

La fameuse liste des numéros verts

Consultez le tableau ci-dessus, et dites-moi si vous y voyez un quelconque numéro alloué à la détresse des personnes en recherche active de travail ? Personnellement, je n’en ai pas remarqué d’annoté !…

Ce qui m’amène à l’article de l’Est Républicain date du 29 janvier, concernant le drame survenu dans cette agence du Pôle Emploi de Valence. Je cite : « Célibataire et sans enfant, Gabriel Fortin, ancien ingénieur de 45 ans, suspecté d’avoir tué une conseillère Pôle emploi et une autre employée, résidait à Nancy, rue de Saverne. Les services de police ont perquisitionné son domicile. Dans la résidence, les voisins évoquent un homme discret. »

Un voisin raconte : « J’ai vu la police, tout le monde l’a vue, je me demandais pourquoi. Je ne sais pas à quoi il ressemble », assure-t-il. »

Il faut en conclure qu’à partir du moment où vous êtes une personne sans histoire, vous passez inaperçu, mais que surtout vous n’avez besoin de rien. Et pourtant, au-delà du manque de repères, vous n’avez même pas un numéro gratuit à votre disposition sur lequel vous pourriez vous raccrocher.

Pire, on s’étonne que pareil drame puisse se dérouler à côté de chez nous, alors que l’isolement des personnes semble être au cœur du sujet.

 

Alors, les questions que nous sommes en droit de nous poser sont :

  • Mais comment en a-t-on pu en arriver là ?
  • L’individualisme sera-t-il toujours de mise ?
  • La pression de pouvoir s’intégrer au sein de la société sera-t-elle toujours aussi importante ?
  • Ceux qui nous gouvernent se posent-ils les bonnes questions ?

Nous ne savons pas encore ce que seront les normes de la prochaine société à l’issue de la pandémie créée par la Covid-19. Néanmoins, on peut déjà se demander quels seront les modes de fonctionnement que l’on peut supposer différents de ceux d’avant.

Il n’y a aucun doute que cette année encore, le virus continuera de tester notre force mentale et la qualité de nos relations. Ce qu’il y a de presque certain, c’est qu’il y a de fortes chances qu’il continuera d’aggraver les inégalités existantes dans la société, de faire pression pour une plus grande durabilité et d’exiger de nouvelles façons de prospérer en 2021 et au-delà.

 

Mais et l’humain dans tout cela ?