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Le choix entre Jupiter et la ‘diablesse’

By 21 avril 2022 avril 24th, 2022 No Comments

A quelques jours du 2ème tour des élections présidentielles 2022, nous avons droit a une revanche de celui de 2017. Nous connaissons les deux protagonistes : l’une résiliente et héritière du parti politique créée par son père pour une grande souveraineté de la France ; l’autre, le président sortant, dont les positions verbales de ces derniers mois ont attisé pas mal de rancœur parmi la population.

Si l’on en croit les chiffres du premier tour du concours 2022, 72% des électeurs se seraient déplacés, tandis que plus d’un quart des électeurs inscrits (12 824 169) ne se seraient pas présentés…

Pour comprendre ce qui est en jeu, il y a trois choses à retenir de ce premier tour.

 

1/ Macron et Le Pen dominent le perchoir politique

Le clivage entre les partis de gauche et droite traditionnels n’existe plus en France et a été remplacé par une opposition entre un bloc majoritaire pro-européen et ouvert au le monde extérieur d’un côté et les nationalistes de l’autre. Les deux candidats ont obtenu des scores plus élevés qu’il y a cinq ans, laissant la droite et la gauche traditionnelles dans un état encore plus chaotique qu’auparavant.

L’écart entre eux est plus élevé que la dernière fois, ce qui montre que Macron a réussi à recueillir le plus de voix malgré les controverses dans le dernier kilomètre de la campagne, notamment sur l’utilisation excessive par l’État des cabinets de conseil, dont celui de McKinsey. Néanmoins, Marine Le Pen peut bénéficier des voix de Messieurs Eric Zemmour et d’un autre nationaliste Nicolas Dupont-Aignan réunis, sans compter une partie des indécis qui se prononcent au dernier moment.

 

2/ Quid des pro-Mélenchon

Monsieur Mélenchon est arrivé très bon troisième à moins de 2% de Madame Le Pen. C’est dire que si la population française s’était mobilisée dans son intégralité, il est possible que ce soit lui qui ait été au second tour. Il faut dire aussi qu’il a bénéficié de la pauvreté de tous les autres candidats aussi de gauche, notamment le communiste Fabien Roussel et les Verts Yannick Jadot, qui eux ont fini par s’en tirer moins bien que prévu.

Quant à la maire socialiste de Paris Anne Hidalgo, elle n’a même pas pu atteindre les 2 %. C’est trois fois moins que le score déjà historiquement bas du candidat socialiste de 2017 Benoît Hamon. Dès les résultats, Jean-Luc Mélenchon n’a pas appelé spécifiquement à un vote en faveur de Macron – laissant à son électorat le choix entre ne pas voter et soutenir le président français. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’un grand nombre de ses électeurs devraient s’abstenir au second tour plutôt que de voter Le Pen.

 

3/ Une abstention plus faible que prévu

Les taux d’abstention étaient certes élevés, mais pas autant que prévu ; les derniers chiffres d’IPSOS faisaient état de 26% environ. C’est évidemment plus qu’en 2017, lorsque 23% des personnes inscrites sont restées chez elles. Cependant, le taux d’abstention est inférieur à celui de 2002. Il y a deux décennies, près de 28,5 % des Français décidaient de rester chez eux, ce qui avait permis à Jean-Marie Le Pen, le père de Marine, de se qualifier pour la première fois au second tour.

Néanmoins, ce résultat défie certains sondeurs, qui avaient prédit qu’un record de 30% des électeurs éligibles ne prendraient pas la peine de voter. Une erreur probablement dû :

  • A des techniques de filtrage inexactes pour identifier les électeurs probables et improbables, ce qui peut considérablement fausser une prévision, et/ou
  • Une mauvaise interprétation des taux de « non-réponse ». Il s’avère que les gens sont beaucoup moins susceptibles de répondre à un sondage s’ils pensent que leur candidat est en retard.

Les sondeurs pondèrent souvent les réponses afin que la répartition des personnes dans l’enquête corresponde mieux à la population globale. Mais ces techniques peuvent être désactivées.

Un problème courant, par exemple, découle de la façon dont les sondeurs tentent d’éliminer les électeurs improbables. Une autre erreur probable serait de mal interpréter l’importance des personnes qui refusent de répondre aux sondages. Sans compter que dans les faits, le redressement peut faire appel à d’autres critères, plus une part de ‘cuisine maison’ propre à chaque institut… et à leur sensibilité bien sûr.

 

Sans surprise, le gagnant est…

Ne soyons donc pas surprise des résultats d’il y a une dizaine de jours. Personnellement, ce qui m’aurait beaucoup plu, c’est l’affrontement de Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen au 2ème tour ; ainsi, nous aurions vraiment pu apprécier dans quel camp des extrêmes, le cœur des Français balançait le plus. Mais, penchons-nous sur ce que veulent bien nous proposer les deux finalistes sur les sujets suivants :

1/ Dossier ‘Démocratie’

Candidat Macron :

  • « Convention transpartisane » pour relancer la réforme des institutions gelées par l’Affaire Benalla
  • Instauration du « conseiller territorial »
  • Extension du « service national universel »

Candidate Le Pen :

  • Scrutin proportionnel
  • Instauration d’un referendum d’initiative citoyenne

 

2/ Dossier ‘Ecologie’

Candidat Macron :

  • Lancement « immédiat » de six réacteurs nucléaires et huit autres dans la foulée
  • Multiplication par dix de la puissance solaire, création d’une cinquantaine de parcs éoliens en mer
  • Rénovation énergétique de 700 000 logements par an

Candidate Le Pen :

  • Interdiction des projets éoliens au profit du nucléaire, de l’hydraulique et de l’hydrogène
  • Soutien aux dispositifs de stockage de l’eau Interdiction des importations de produits agricoles ne respectant pas les normes françaises

 

3/ Dossier ‘Education’

Candidat Macron :

  • Autonomie des écoles primaires et orientation dès la 5e
  • Rémunération au mérite des enseignants
  • Nouvelle reforme du lycée pour favoriser l’alternance

Candidate Le Pen :

  • Uniforme jusqu’au collège et vidéosurveillance généralisée
  • Fin de l’éducation prioritaire
  • Suppression des allocations en cas d’absentéisme

 

4/ Dossier ‘Europe’

Candidat Macron :

  • Affirmation de l’Europe de la défense avec « une doctrine commune » et « un renforcement considérable des capacités des armées »
  • Investissement dans les « champions » européens et certaines infrastructures (cloud, satellites, métavers, etc…)

Candidate Le Pen :

  • Disparition de la sortie de l’euro du programme
  • Refus de modification de la Constitution en cas de contradiction avec un texte européen

 

5/ Dossier ‘Immigration’

Candidat Macron :

  • Davantage de police et de contrôles aux frontières
  • Durcissement des conditions d’obtention des titres de séjour
  • Retour de la double peine

Candidate Le Pen :

  • Referendum pour modifier la Constitution, pour notamment instaurer la « priorité nationale »
  • Retour du délit d’entrée irrégulière
  • Renégociation des accords de Schengen

 

6/ Dossier ‘Police et justice’

Candidat Macron :

  • Augmentation de 1.5 milliard d’euros le budget du ministère de l’intérieur
  • « Pacte républicain » avec « 200 brigades » de gendarmerie et doublement de la présence policière

Candidate Le Pen :

  • Instauration d’une « présomption de légitime défense renforcée » pour les policiers et gendarmes
  • Augmentation de 85 000 du nombre de places de prison
  • Aggravation des peines et suppression de l’aménagement pour celles supérieures à six mois

 

7/ Dossier ‘Pouvoir d’achat’

Candidat Macron :

  • Poursuite des baisses d’impôts dont la suppression de la redevance télé
  • Instauration d’un « abattement » à hauteur de 150 000 euros des droits de succession
  • Multiplication par trois de la « prime Macron »

Candidate Le Pen :

  • Incitation a une hausse de 10% des salaires mais non contraignante et exonérée de hausse des cotisations (c’est-à-dire du salaire différé)
  • Baisse de la TVA sur l’énergie
  • Suppression de la redevance via la privatisation de l’audiovisuel public

 

8/ Dossier « Santé’

Candidat Macron :

  • Décloisonnement des structures hospitalières publiques et privées
  • Généralisation de la présence d’assistants médicaux et infirmiers dans les zones les moins dotées
  • Déploiement des internes en 4e année

Candidate Le Pen :

  • Ouverture de 10 000 places pour former des infirmières et des aides-soignants
  • 2 milliards sur cinq ans pour la revalorisation des salaires des personnels soignants
  • Reduction de l’AME a la seule prise en charge des soins urgents

 

Quelques mises au point s’imposent 

La première concerne le parti de Marine Le Pen, lequel est, selon ses pairs, « victime de diabolisation ». Si tel est le cas, deux réflexions s’imposent :

  • sa création pose un souci d’ordre juridique, propage de fausses informations, préconise l’insurrection en prônant la population à la mobilisation et aux émeutes, et là il semblerait que pour le bénéfice de la paix publique, il serait mieux que ce mouvement idéologique soit simplement dissout, ou bien
  • cette réunion d’individus est reconnue comme une structure démocratique à part entière et donc légitime, et dans ce cas soit permis de se positionner sur une doctrine politique professée par ses membres, qui lui est propre.

La deuxième concerne le ton ironique et hautain d’Emmanuel Macron durant le débat d’hier soir, donnant de lui cet air arrogant, voire condescendant dont il a habitué la population française depuis ces cinq dernières années. Aujourd’hui, M. Macron marmonne à nouveau sur le durcissement des règles de retraite pour garder les Français à leur bureau jusqu’à plus tard dans la vie. La France, terre de lente restauration et d’indignation rapide, se prépare au pire.

Sa politique du ‘quoi qu’il en coûte’ va devenir un énorme boulet dont la Nation ne se remettra peut-être jamais. La dette, a-t-il dit, a été contractée dans le cadre de sa réponse à la pandémie qui offrait des programmes de congés payés, des subventions pour les entreprises fermées et un large éventail d’autres aides. Question : n’y avait-il pas d’autres moyens que de mettre par deux fois dans la même année 2020, l’économie française en ‘stand still’ ?

Les partisans du « Frexit » décideront-ils du résultat de l’élection présidentielle française ? La question mérite d’être posée car depuis l’adhésion à l’UE, la France, à l’instar des autres pays membres, a (qu’on le veuille ou non !) perdu de son autonomie, notamment en matière d’immigration, de politique monétaire et fiscale. Personnellement, je me pose deux questions avant le prochain vote de dimanche prochain :

  • en quoi, les propos de Marine Le Pen et ses sbires seraient-ils moins défendables que ceux émis par les représentants de la France Insoumise (par exemple) ?
  • pourquoi le programme du Rassemblement National serait-il moins acceptable que celui d’Emmanuel Macron ?