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Les facteurs politiques et la pandémie d’intox

By 10 février 2022 No Comments

Le climat politique actuel est devenu de plus en plus auto-glorifiant, une sorte de théâtre démocratique qui dépendrait apparemment des ’Likes’, des retweets, des extraits sonores, des mèmes et des slogans. Le tribalisme politique a ruiné la façon dont nous interagissons avec les politiques et, à l’ère d’Internet, cela a fait dérailler la façon dont nous nous engageons dans notre discours.

L’hyper-partisanerie et la polarisation ne font que s’intensifier sur le web, chaque utilisateur essayant toujours de surpasser l’autre en produisant l’indignation. Cela devient de plus en plus préoccupant avec la prise de conscience qu’à l’ère moderne, la plupart de nos discours existent en ligne. Et c’est cet environnement incendiaire qui a ouvert la porte à la crise actuelle des ‘fake news’. De nombreuses ‘fausses nouvelles’ (informations falsifiées ou trompeuses), pourtant présentées comme des sources d’informations crédibles, circulent comme si elles étaient réelles.

Souvent, ces fausses nouvelles sont diffusées avec un agenda particulier en tête, et la culture politique réactionnaire et sensationnaliste qui sévit très largement sur Internet, aggrave énormément le problème.

 

Le monopole de l’intox en politique

Première femme à représenter la droite à l’élection présidentielle, Valérie Pécresse (VP) voudrait faire entendre sa ligne libérale sur le plan économique et serait plutôt ferme sur les questions régaliennes. Profitant d’une bonne dynamique depuis sa victoire à la primaire LR, elle a même été donnée en capacité de gagner l’élection présidentielle. Il faut dire qu’elle s’en donne les moyens en multipliant les déplacements et rencontres avec l’ambition de conforter l’unité toute relative de sa famille politique, se rendant chez chacun des candidats défaits à la primaire.

Mais il faut dire aussi qu’elle a bien été aidée en cela par les proches d’Emmanuel Macron (EM). En effet, avant même de gagner la primaire contre Eric Ciotti (EC) en décembre dernier, la présidente de la région Île-de-France était déjà considérée par le Président, comme la candidate contre qui, il aurait le plus de difficulté à affronter.

Alors intox ? Pas tout à fait, parce qu’il est vrai qu’il est beaucoup plus facile de taper sur les Bertrand, Barnier ou Ciotti que sur une femme, comme Madame Pécresse, de peur de se faire taxer de misogyne. Serait-ce donc la nouvelle technique qui permettrait de déstabiliser un adversaire en lui fournissant de fausses informations ? Voici les dernières intox liées à l’actualité des élections :

1/ Le chiffre des 300 000 emplois soi-disant ‘non pourvus’ et largement relayés par EM et son Premier ministre – un chiffre soi-disant diffusé par la Banque de France. Or, une fois contactée, cette institution n’aurait jamais être à l’origine de cette intox. On apprend que c’est la DARES, rattachée au Ministère du Travail qui quelques mois plus tôt aurait fait part que 265 000 seraient déclarés vacants.

2/ L’affaire suivante concerne Michel Barnier, ex négociateur en chef pour préparer et diriger les négociations sur les conditions du retrait du Royaume-Uni de l’UE. En septembre, celui-ci oubliait quelque peu ses précédentes fonctions en expliquant, je cite : « Il faut retrouver notre souveraineté juridique pour ne pas être menacé en permanence d’un arrêt ou d’une condamnation au niveau de la Cour de justice européenne ! »

Alors intox ou non, c’est pourtant lui qui très précisément souhaitait à ce que cela soit imposé aux Britanniques en 2017 lors des négociations du Brexit.

3/ Autre intox qui fait référence au rapport de l’Agence Technique de l’Information sur l’Hospitalisation qui indiquait, je cite : « Les patients COVID ont représenté 2% de l’ensemble des patients hospitalisés au cours de l’année 2020 ! » Information très largement relayée sur les réseaux sociaux, et notamment par la candidate du RN. Sauf que ce chiffre doit être lissé sur l’ensemble de l’année.

Cette information même si réelle, est toutefois à mettre en perspective, car dans ce même rapport, il est bien indiqué que les services des hôpitaux ont eu deux pics importants lors du contexte de la pandémie. Des malades sont arrivés en très grand nombre et en très peu de temps au cours des deux premières vagues de l’épidémie qui ont submergé ces mêmes hôpitaux.

4/ Une fois VP investie candidate ‘Les Républicains’, une nuée de médias pronostiquaient déjà la victoire de la candidate aux élections présidentielles. Sur le papier, elle vient d’obtenir les 500 parrainages d’élus*, seuil indispensable pour se présenter à l’élection présidentielle. Son premier objectif atteint, son intention sera de passer le premier tour, avant d’atteindre son deuxième objectif à savoir réunir toutes les droites, pour prétendre à la victoire finale et son élection à la présidence de la république française.

*A ce jour très précisément, elle dispose déjà de 939 signatures sur les 500 demandées.

Et des exemples comme ceux-ci, sont pléthores, car ce sont bien là, des rhétoriques politiques classiques, utilisées par tous les partis. Une stratégie pas forcement mensongère, mais qui à chaque fois, omet – sciemment ou non – de prendre en compte tous les critères et qui présente seulement une partie de la vérité, et que sous un angle bien précis.

 

L’intox dans la débâcle des sondages

Nous savons tous que les instituts de sondages sont très contestés, mais en se penchant un peu plus sur ce qu’est leur processus à constituer un échantillon représentatif de la population française, on peut affirmer qu’ils sont très largement contestables. A l’origine, les sondeurs employaient des armées d’enquêteurs qui frappaient aux portes et interrogeaient les gens chez eux. Depuis l’apparition du téléphone et à fortiori de l’Internet, cet échantillon-là s’est ‘professionnalisé’, à tel point que ce sont maintenant des volontaires qui viennent s’inscrire sur les panels pour répondre à des questionnaires. En contrepartie du temps imparti à répondre, les sondés obtiennent des gratifications – souvent sous forme de bons d’achats – mais la qualité des réponses liée aux thématiques des enquêtes, reste floue.

D’autant plus en politique, où les sondés n’aiment pas raconter à un enquêteur que leur choix penche vers un bord ou l’autre du prisme de cette thématique jugée toujours sensible. Cela implique une sous-estimation systématique des votes extrémistes et son corollaire, et la surestimation du vote centriste. A cela, il faut aussi y ajouter les méthodes de redressement des instituts qui elles, restent encore très opaques. Dans les faits, le redressement peut faire appel à d’autres critères, plus une part de ‘cuisine maison’ propre à chaque institut… et à leur sensibilité bien sûr.

Un emballement reflétant l’intoxication des médias aux sondages, malgré une conscience claire de leurs limites. Cela démontre une fois de plus  que cette hérésie de vouloir sonder un panel de moins de 2 000 personnes n’est pas fiable du tout. Comme toujours, l’important n’est pas tant de ne rien avoir à dire, mais que tout le monde en parle. Les sondeurs courent simplement le risque de créer une situation en partie artificielle, bien loin de ce que les scrutins seront au soir du 24 avril prochain !